« Lorsque je t'ai écrit la première fois, je n'ai pas été entièrement honnête. J'ai voulu passer pour quelqu'un sans problème et doué en tout, mais ce n'est pas le cas. Depuis ta réponse, je culpabilise beaucoup et je prends enfin mon courage à deux mains pour t'écrire la vérité sur moi. Je ne suis pas un leader. Je n'ai jamais été capitaine de Quidditch chez les Serpentards pour la bonne et simple raison que je suis de Serdaigle et que je n'ai jamais été emballé par l'exercice physique. Voler sur un balai me fait peur. J'ai le vertige d'après ce qu'en disent les moldus. Un comble pour un sang-pur. Car oui, je t'ai aussi menti là-dessus. Je ne suis pas un sang-mêlé, je fais parti de ceux qu'on regarde de travers dans la rue parce-qu'ils ne se sont jamais mêlés. Mais au fond, je m'en fiche. J'en suis fier. Maman était la plus belle sang-pur que le monde sorcier ait jamais connu et ça, personne ne me l'enlèvera.
Je sais. Tu dois te dire que c'est étrange de dire encore le mot Maman à 29 ans. Mais elle est décédée quand j'en avais huit. Et je me rappelle chaque jour de son visage pour ne pas l'oublier. Les photos que j'ai d'elle, je les conserve précieusement dans une boîte en carton que j'avais décoré pour elle, pour la fête des mères, juste avant qu'elle ne disparaisse. Un accident de dragon selon mon père. Mais je sais qu'il me cache la vérité et jusqu'à ce jour, je n'ai pu en trouver aucun indice. Ce doute me ronge comme une vipère depuis que j'en ai pris conscience. Depuis mes 8 ans, je suis quelqu'un d'un peu étrange. Je ne suis pas méchant, mais il vaut mieux ne pas trop me contredire. Je fais des crises de colère. On dirait une autre personne. Même moi je me sens planer au dessus de mon propre corps lorsque cela m'arrive. Mon père m'a emmené à Sainte Mangouste. Ils n'ont rien pu faire, c'était psychologique. Même retirer les souvenirs de ma mère n'a pas fonctionné (parce-que je refusais de l'oublier, l'esprit peut-être plus fort que la magie dans certains cas). Mes crises empirant, mon père m'a fait interner pendant un an avant mon entrée à Poudlard car j'étais trop dangereux pour les autres qu'il disait. Je le déteste pour ce qu'il a fait. Même si ce fut efficace dans le sens où aujourd'hui je parviens à me contrôler, je lui en voudrais toujours. Il reste mon père mais je n'ai aucun sentiment envers lui et dès que j'ai pu quitter la maison à mon entrée à Poudlard, je n'hésitais pas à passer les grandes vacances ailleurs. Je me réfugiais chez mes grands-parents qui me comprenaient autant qu'ils le pouvaient. Grand-Père était quelqu'un d'autoritaire et de strict, mais nous nous comprenions tous les deux, je n'étais pas turbulent même si j'avais mûri considérablement. Il m'appréciait et c'était réciproque.
Je dois fermer la boutique, je t'écrirais une lettre prochainement si tu tiens toujours à garder contact avec moi après ces révélations. Je t'embrasse,
Adam. »

« Je suis heureux d'avoir reçu ta réponse. Vu le temps que tu as mis, je suppose que tu ne comptais pas m'écrire au départ et peu à peu tu as compris et changé d'avis. J'en suis ravi car je tiens à notre correspondance. Je vais commencer par répondre à tes questions avant de poursuivre mon histoire.
Concernant mon passage à Sainte Mangouste, je t'avouerais que je n'en ai pas de très bons souvenirs. Aujourd'hui encore, les médicomages me mettent mal-à-l'aise et plus je suis loin d'eux mieux je me porte (à l'exception d'un ami, mais ça c'est une autre histoire). Je me souviens d'un jour où je me suis retrouvé en isolement pour me calmer. La pièce était affreusement sombre, j'y voyais à peine. Il n'y avait pas de coin, pas de rebord, rien à quoi je puisse me raccrocher. Mes sens étaient perdu, pas d'odeur à part celui de ma peau et de mon souffle, pas de lumière, pas de bruit, et le toucher si monotone. Ils m'ont laissé là... je ne sais plus si c'est des heures ou des jours. Avec du recul, c'était sans doute quelques heures à peine, mais pour mon esprit d'enfant ce fut une éternité. Une torture. Après ça, mes crises étaient moins violentes et j'appris peu à peu à me contenir pour que tout ce personnel me laisse tranquille. Je faisais même des projets pour Poudlard. Je leur disais que je voulais être capitaine de Quidditch et le meilleur en soins aux créatures magiques. Tout ce que je n'ai jamais été. Non. Moi mon truc, c'était les runes, l'astronomie, les sortilèges et l’étude des moldus. Mon grand-Père n'appréciait pas trop ce dernier engouement mais il ne me força jamais à laisser cette matière de côté. Les moldus, je leur trouvais quelque chose de fascinant. Jamais libres et pourtant, ils y croyaient encore et toujours sans savoir qu'ils étaient toujours soumis à un homme, un concept ou un objet. Pour moi, c'était un peu comme des fourmis que l'on étudie en se demandant ce qu'elles pouvaient bien fabriquer.
Alors quand il y a eu cette affaire Fizwizbiz, laisses moi te dire que j'avais de quoi observer. Les moldus n'acceptant pas leur magie sont pour moi les plus intéressants à étudier mais tous les autres le sont aussi. En un sens, c'est amusant de les voir se dépatouiller avec une chose qu'ils ne maîtrisent absolument pas. D'un autre côté, je n'ai pas compris pourquoi les sang-pur en ont soufferts. Certes ce Thomilius Mustard avait dépassé les bornes je le reconnais. Il avait même créé une sacrée pagaille. Mais est-ce que c'était une raison pour s'en prendre à nous ? Enfin les Lovelace ne s'en sont pas trop mal tirés jusqu'à présent et je ne me plains pas. D'autres se font plus souvent harceler que nous. Nous la jouons plutôt discret, évitant de nous mettre trop en avant et de parler de notre ascendance. Même si tout le monde sait que le nom de Lovelace signifie sang-pur, nous ne le mentionnons pas et les gens ne nous détestent pas forcément. La preuve, tu m'as écris la première fois en le connaissant.
Oh, il y a du monde dans la boutique. Je t'embrasse,
Adam. »

« Tu trompes lorsque tu m'écris que je suis quelqu'un de triste et mélancolique. J'ai peut-être acquis plus de sagesse qu'un autre à cause de ce qu'il s'est passé, mais je ne pense pas être celui qui ait le plus souffert en Angleterre. J'ai des valeurs qui n'ont rien à voir avec celles que tu pourrais croire. Le pacifisme ? C'est mieux, mais je ne suis pas forcément pour. Tu connais mes problèmes de gestion de la colère et je serais bien mal placé si je me vantais d'être un pacifiste. J'aime m'instruire et lire, ce n'est pas pour rien que j'ai été dirigé vers Serdaigle, ce dont je suis encore fier aujourd'hui car j'aime mon travail. Je peux conseiller facilement les gens sur ce qu'ils recherchent et j'ai toujours de bons retours de la part de mes clients qui reviennent souvent me voir.
A côté de ça, je ne suis pas quelqu'un de morne. Si tu acceptais de me rencontrer un jour, tu le verrais par toi même. J'aime la gestuelle, je bouge beaucoup les bras quand je parle (ce qui agace ma grand-mère) et mon grand-père éclate de rire à cause des mimiques de mon visage. Je suis souriant. J'aime sourire. Le sourire est un illuminateur de journées. J'ai parfois du mal à comprendre les sous-entendus que font les moldus et je me sens un peu à l'écart dans ce sens là. Parfois, j'aimerais être né moldu pour ne pas avoir ce genre de problèmes. Mais j'ai rencontré des gens qui m'aiment malgré ces défauts et qui s'en accommodent très bien. J'aime rire. J'adore ça même. Et je me réjouis en général d'un rien car j'évite de penser à mon passé. Dans mon cerveau, tout ça est enfermé dans de petits tiroirs que je n'ouvre que très rarement. Je crois bien avoir jeté la clé de certains mais ce n'est pas très grave pour le moment.
Grand-père m'a laissé vivre seul à condition que je vois un psychomage une fois par semaine. Ce à quoi je me suis plié docilement. Au départ, ce fut difficile, je ne m'entendais pas vraiment avec lui. Et je crois bien que je l'insupportais. Mais on est devenus peu à peu amis. Surtout depuis qu'on s'est retrouvé coincé dans un train fantôme ensemble. J'en ai encore des frissons. Brrrr. J'ai du passer bien deux heures entières accroché à son bras. On est pas ressortis indemnes d'ailleurs. En tout cas, c'est un bon ami maintenant, même si je ne sais pas ce qu'il en est pour lui, j'ai beaucoup moins de problème à me confier à lui. Au final, il sait bien plus de choses sur moi que je n'en sais sur lui. J'espère qu'un jour cela changera.
Je fais aussi très attention à mon physique. J'aime m'habiller et la mode moldus m'intrigue, je n'ai pas encore osé essayer entièrement. Je me contente du classique pour le moment, mais qui sait si ma curiosité me pousse à plus d'originalité vestimentaire. Ça peut te paraître étrange, mais j'aime la beauté. C'est ce qui me fascine aussi dans l'histoire antique moldu. Je me renseigne peu à peu dessus. J'ai même ouvert un rayon livres moldus dans ma librairie. Il faut bien s'adapter et vendre si je veux faire tourner ma boutique et pouvoir payer mon logement. Ce n'est pas en faisant le difficile que je m'en sortirais, et je crois que ma famille l'a bien compris, dès le départ.
Je vais devoir te laisser, si tu as d'autres questions me concernant, je me ferais un plaisir de te répondre. J'aimerais qu'un jour nous allions prendre une bière au beurre si tu le veux bien.
Je t'embrasse,
Adam. »