Elle attendait dans la salle d'attente depuis une petite vingtaine de minutes quand la grande brune à forte poitrine qui lui servait de psychomage ouvrit enfin la porte. Elle allait chez la psychomage depuis qu'elle était toute gamine - la première fois qu'elle y était allée, elle devait avoir six ans - mais celle-ci était une nouvelle, l'ancienne psychomage de Rue ayant été récemment mangée par un dragon alors qu'elle était en vacances quelque part en Asie. Rue aimait bien son ancienne psychomage, celle qui la suivait depuis toujours ; c'était une petite mamie rondouillette qui portait toujours la même horrible robe bleue à fleurs rouges. Celle-ci, la nouvelle... elle ne l'aimait pas vraiment, mais bon, elle faisait avec. Rue-Tea Hawkes ? Et même après trois séances, cette conne ne savait pas encore qui elle était. C'est moi. Ah oui. Aujourd'hui ça sera Aniah qui te prendra, j'ai un rendez-vous important Parce que vos patients ne sont pas importants, peut-être ? Au fond, Rue était contente ; elle n'allait pas se taper la GBCAFP cette fois ci. GBCAFP ? Vous pouvez traduire par grande brune conne à forte poitrine. Elle ne savait plus son prénom et avait prit l'habitude de l'appeler intérieurement la GBCAFP. La GBCAFP lui lança un regard noir avant de lui fermer la porte au nez. Ouais, connasse. Heureusement pour elle, Rue connaissait Aniah - une gentille petite blonde qui avait toujours l'air un peu perdue - et elle savait donc où se trouvait son bureau. Elle descendit donc un étage, tourna à droite et frappa à la troisième porte. Ah Rue, c'est toi ! Ouais. Et euh... désolée pour le retard, la co... Euh... ma psychomage vient juste de me dire que je devais aller vous voir pour la séance d'aujourd'hui. Mais ce n'est rien ma puce, entre donc ! Rue entra dans le bureau - pas trop grand mais pas trop petit, un bureau posé au fond, un divan devant une grande cheminé blanche - et s'installa sur le divan. On n'avait plus besoin de lui dire, elle savait ce qu'elle devait faire. Bon, aujourd'hui comme c'est ma première séance avec toi, j'aimerais que tu me racontes un peu ton enfance, tout ça, tu vois ? Rue aimait bien Aniah, elle ne parlait pas comme la GBCAFP, elle était cool. Ouais, je vois. Alors euh... je commence par où ? Hum... je ne sais pas... Parle moi de tes parents par exemple. Mon dieu, si elle commençait à parler de ses parents, elle n'avait pas fini... Alors mes parents... Vous n'avez pas pris le sujet le plus cool mais bon. Pour commencer, ça fait treize ans que je n'ai pas vu mon père. Il est parti sans rien dire à personne quand j'avais trois ans ; ma mère et moi n'avons jamais su pourquoi. Bien sûr, ma mère est abattue depuis et c'est très certainement pour ça qu'elle est comme elle est aujourd'hui... Qu'elle est comme elle est, c'est à dire ? Si je dis folle, c'est méchant ? Non, enfin peut-être mais tant pis. Ce n'est pas dans mes habitudes de ne pas dire les choses. Ouais, folle, c'est ça. Elle a complètement pété un plomb, elle est brisée, fragile. Elle passe ses journées enfermée dans sa chambre à ne rien faire. Enfin, d'après ce que dit la famille, je ne vis plus chez elle, je vis chez mes grands-parents. Elle n'était plus vraiment capable de s'occuper de moi d'après eux, mais, sans penser que je suis le centre du monde bien sûr, je pense que mon départ l'a encore plus brisée. D'un côté je me sens un peu responsable de son état aujourd'hui. Oui, elle était sûre et certaine qu'elle était en partie responsable de l'état actuel de sa mère. Et ne pas vivre avec ses parents avait définitivement changé Rue. Oh bien sûr dans la vie de tous les jours c'était une jeune fille drôle, sociable, avec son caractère plutôt explosif. Têtue, impulsive mais pas méchante. Elle avait de la répartie et il ne valait mieux pas lui chercher des ennuies. Mais généralement, les gens l'aimaient bien. Les gens voyaient en elle une meneuse, quelqu'un sur qui on pouvait compter mais derrière cette façade de fille forte, elle était terriblement fragile. L'état de sa mère et l'abandon de son père l'avait terriblement affecté ; bien plus qu'elle ne le montrait. Elle continua pendant plus d'une heure à parler de son enfance plutôt heureuse chez ses grands-parents, entourée de ses cousins et cousines, de ses oncles, de ses tantes. De tout le monde sauf ses parents, en bref. Elle parla aussi de la découverte de ses pouvoirs, du bonheur qu'elle ressentit quand elle arriva à faire voler une casserole contre la tête de son grand cousin, celui qui l'énervait toujours. La magie était une des rares choses qui la rendait heureuse, un moyen de s'exprimer, une sorte de liberté pour elle. Bien, maintenant que je connais un peu mieux ton cas, le ministère a demandé à tous les psychomages qui travaillent avec des enfants ou des adolescents de dire ce qu'ils pensent de la récente affaire Fizwizbiz. Donc, qu'est-ce que tu penses de tous ces Moldus qui ont maintenant des pouvoirs, comme nous autres les sorciers ? Mais qu'est-ce que c'était que cette question merdique sérieux ? Woo, il est sérieux le ministère là ? Nan mais franchement, c'est leur problème aux membres du ministère, qu'est-ce que ça peut bien me foutre ? C'est cool ouais, des Moldus qui ont des pouvoirs, franchement... nan sérieux c'est bien. Et puis il parait que c'est le gros bordel dans Londres maintenant, j'aimerais bien voir ça !