Alignés, les uns à côté des autres, les petits tubes contenaient une substance légèrement visqueuse et brillante. Toutes les fioles n’étaient pas remplies mais une petite dizaine l’était. Attrapant la première de la série, Clara la versa dans un petit récipient et fit tourner le contenu d’un coup de baguette.

“Bethany Clara Howard, c’est ainsi qu’elle s’appellera.” Clara se voyait, elle était encore qu’un minuscule petit bébé blotti dans les bras de sa mère. Ce qu’elle observait, c’était d’ailleurs sous le point de vue de cette dernière, Nora Howard. Bethany était un très beau bébé, pleine de vie, des petites mèches châtains se dessinaient déjà sur sa tête et elle remuait déjà beaucoup. Son père, Trent Howard était très fière de sa petite fille et la caressait tendrement sur la joue. Au bout de quelques jours, Bethany put être ramenée à la maison et enfin on pouvait connaître la couleur de ses yeux. Son petit regard tendre et affectueux était bleu-verts et faisait chavirer tous les cœurs. A son âge, elle savait déjà y faire pour s’attirer la sympathie et l’attention des autres. Qu’en sera-t-il dans quelques années ?

Le souvenir s’évanouit pour en laisser paraître un autre.

“Trent dépêche toi de prendre la caméra, parce que je t’assure que si on loupe ses premiers pas, je te détesterai toute ma vie !” “Tu ne peux pas me détester ma chérie tu le sais bien !” Bethany était debout face à sa mère, elle était d’abord hésitante, ne savait pas trop comment faire. Elle leva les deux bras comme pour stabiliser son avancée et comme si elle n’attendait que ça, lorsque son père arriva avec la caméra, elle fit un premier pas en avant, puis un second, un troisième et c’était partie pour vingt-huit longues années de marches qui ne s’arrêteront pas de si tôt.

Clara émergea du souvenir. Ces deux premiers évènements de sa vie sont les plus importants. Le jour de sa naissance, et ses premiers pas. Nora avait conservé avec précaution ses souvenirs dans une petite boîte qu’elle prit soin de léguer à sa fille via son testament. A chaque fois que Clara revoyait ces souvenirs, les larmes lui montaient aux yeux. Ses parents lui manquaient tant … Elle récupéra le contenu de la première fiole et la remit avec précaution à sa place. Elle attrapa un autre tube et le versa dans la pensine.

Bethany était en train de jouer dans le jardin chez ses grands-parents maternels car ses parents avaient tous les deux beaucoup de travail. Ils étaient fonctionnaires au ministère, l’un comme auror, l’autre au département de la Justice Magique. Ils avaient tous les deux un très bon travail et gagnaient assez d’argent pour assurer un futur heureux pour leur petite fille. Bethany savait qu’elle faisait partie d’une famille de sorciers, son père était un moldu né sorcier, sa mère était issue d’une lignée assez pure ; du coup, elle était presque assurée de devenir sorcière, sauf si elle était une cracmolle, mais elle évitait de penser à cela, même si son père aimait la taquiner avec ça car après tout, pour lui, peu importe qu’elle soit sorcière ou pas, il l’aimait tout simplement. Elle jouait tranquillement quand soudain quelqu’un lui toucha l’épaule, elle sursauta et quand elle se retourna, elle se rendit compte que le petit garçon qui avait voulu venir jouer avec elle volait dans les airs. Il était terrifié, mais Bethany ne savait pas quoi faire, du coup, elle appela sa grand-mère qui vint heureusement à sa rescousse. Tout se finit assez bien, le jeune garçon rentra chez lui après être passé sous le joug d’un sortilège d’amnésie et Bethany fut satisfaite, le soir même, d’annoncer à son père qu’elle avait effectué son premier acte de magie.

L’image devint floue et le décor changea quelque peu.

“Beth chérie ! Tu as reçu une lettre !” Des mains se tendaient vers elle, elle attrapa l’enveloppe et l’ouvrit avec avidité. Qu’est-ce que cela pouvait bien être ? Elle en sortit une feuille de parchemin et en la dépliant, elle remarqua l’écriture calligraphiée qui lui annonçait qu’elle avait été admise à l’école de sorcellerie Poudlard. Très heureuse, elle sauta de joie. “Maman, maman ! Je vais aller à Poudlard ! Tu te rends compte, je vais à Poudlard ! (…) Papa papa ! Je vais être une vraie sorcière, une vraie de vraie …” S’arrêtant quelques secondes, elle réfléchit et fit une grimace. “Tu penses que je serai dans quelle maison ? J’veux pas être à Serpentard, tout le monde dit que c’est une mauvaise maison.” “On verra bien ma chérie, mais n’hésite pas à faire par de ta répugnance pour cette maison, le Choixpeau magique t’écoutera !” Satisfaite, Bethany rangea la feuille dans l’enveloppe et quelques jours plus tard, elle alla au chemin de traverse pour acheter ses fournitures. “J’ai le droit d’avoir une chouette ?” Sa mère esquissa un sourire, elle l’emmenait acheter sa baguette et après de nombreux essais, Ollivander, dernier du nom, lui dit “Ce sera donc bois de saule, crin de licorne, 27,3 centimètres. Félicitation belle demoiselle, tu viens d’acquérir ta première baguette !” Les jours suivant, Bethany ne put s’empêcher d’ouvrir la boîte dans laquelle reposait sa baguette chaque matin et ce, jusqu’au jour du départ.

“Bethany Howard ?” Bethany s’avança sur la petite estrade et s’assit sur le tabouret. Elle ne savait pas vraiment si elle devait dire au Choixpeau qu’elle ne voulait absolument pas être prise à Serpentard. Au moment où le professeur posa le chapeau sur sa tête, elle décida de s’abstenir et attendit patiemment la réponse, mais malgré tout prête à bondir de sa chaise lorsque le moment sera venu. “Gryffondor !” Heureuse comme jamais Bethany s’avança vers la table des Gryffondor et prit place pour écouter la fin de la répartition. (…) Lorsque les cours commencèrent, il s’avéra que Bethany était une très bonne élève qui avait beaucoup de potentiel, elle aurait eu sa place à Serdaigle, mais ses accès de folie et ses habitudes à faire des bêtises quand cela lui venait lui garantissait une bonne place à Gryffondor. Elle attacha très vite de l’importance aux cours de potions, d’astronomie, de sortilèges et de métamorphose ; mais sa plus grande passion restera à jamais la défense contre les forces du mal. Elle était faite pour cette matière, elle était une idéaliste, qui voulait que le monde soit parfait, en paix, quelque chose de tout à fait utopique et la défense contre les forces du mal lui permettait de se dire que cela serait peut-être possible un jour.

Une fois de plus, le souvenir se termina, et Clara répéta les mêmes gestes. Elle attrapa ensuite la cinquième fiole de la boîte. La plus importante, celle qui marqua un grand tournant dans sa vie.

“Bethany, je suis vraiment désolée …” La grand-mère de Bethany avait pris un air très sérieux. C’était encore les vacances, mais le monde magique était devenu sombre, les attaques de Mangemorts se répétaient et le plus grand Mage noir était de retour, Bethany savait très bien que les choses allaient mal, mais elle ne se doutait pas que cela la toucherait de si près. “… Bethany, ma grande, le ministère est tombé, il est sous l’emprise des Mangemorts. Tes parents ont tout fait pour aider … Je …” Bethany n’eut pas à entendre la suite, elle ne voulait pas. Elle quitta la pièce en courant et se réfugier dans le petit placard sous l’escalier. Blottie en petite boule, elle resta plusieurs heures cachées, sa grand-mère ne pensant pas qu’elle se trouverait là au milieu des araignées dont elle avait la phobie. Ses parents étaient morts, alors qu’ils essayaient de sauver le ministère. Pourquoi cela devait lui arriver à elle ? Comment était-ce possible ? Les larmes coulaient abondamment sur les joues roses de la petite fille, c’était tellement douloureux de la voir souffrir.

“Grand-mère, je ne veux pas y retourner, j’ai reçu des coups de bâtons, ils sont horribles, je t’en supplie !” “Je suis désolée ma chérie, mais tu es plus en sécurité à Poudlard qu’ici. Ton grand-père est un ancien auror, il est un traitre pour les Mangemorts, ils le recherchent, je ne veux pas que tu restes ici, que tu meurs. Je crois que je préfère te voir recevoir des coups plutôt que de mourir. Je t’aime tellement ma petite, mais tu dois être forte, comme l’ont été tes parents.” Sa grand-mère la prit dans ses bras et l’enserra très fort. Bethany détestait Poudlard cette année, les choses avaient changé, les cours n’étaient plus les mêmes, sa matière préférée n’était même plus enseignée, tout ce qu’elle avait toujours redouté, elle le vivait. La paix est-elle impossible ?

En sortant de ce souvenir, Clara se mit à pleurer, elle dut s’asseoir quelques instants pour se remettre de ses émotions, puis elle attrapa le tube suivant.

“S’il vous plait, monsieur ! Vous savez bien que je ne veux faire de mal à personne, mais depuis la mort de mes parents, je veux prouver à tout le monde que je peux être forte et que je peux faire mieux que beaucoup d’autres. Je pense que la légilimancie est une chose que je peux maîtriser sans en faire un mauvais usage.” Après la fin de la seconde guerre des sorciers, la reconstruction de Poudlard a permis à Bethany de retourner très vite à l’école de sorcellerie. Toujours très ambitieuse, elle avait tourné la page de la mort de ses parents, sans pour autant les oublier. Elle se souvenait d’eux à chaque fois qu’elle pensait à la défense contre les forces du mal. Elle voulait qu’ils soient fiers d’elle, elle envisageait de devenir auror comme son père et son grand-père et d’exceller partout où elle le pouvait. Elle réussit d’ailleurs ses BUSE avec brio et obtint l’intégralité de ses ASPIC sans grand problème. De plus, elle avait fini par acquérir la faculté de légilimancie et était prête à se lancer dans une formation d’auror. Tout le monde lui disait d’ailleurs qu’elle en sortirait sans aucun doute dans les meilleurs.

Rangeant rapidement ce souvenir, Clara attrapa la fiole qui marquait le deuxième tournant de sa vie.

“Salut Indianna ! Comment tu vas ? Prêt pour l’examen final ?” Bethany était assise sur un banc aux abords de la salle d’entraînement à la formation aux aurors. Elle souriait à son interlocuteur de qui elle s’était rapprochée durant cette formation. Bethany était fatiguée, des cernes marquaient ses yeux. Elle se tenait très droite et avait une main plaquée sur son ventre. “Ca peut aller … et toi ?” Bethany parut hésitante. “Je l’étais, mais je crois que je ne le suis plus.” Sous le regard étonné d’Indianna, Bethany quitta la pièce et alla se changer. Vérifiant que personne ne la suivait, elle se déshabilla, enleva son corset et se regarda dans le miroir. Son ventre était arrondi de trois mois de grossesse. Jusqu’alors elle avait tenu la distance, mais elle ne pouvait plus. Elle avait été agressée par son instructeur de formation mais voulant rester forte, elle avait décidé d’aller au bout d’elle-même pour terminer ce pour quoi elle avait travaillé dur. Mais elle ne pouvait plus, elle était fatiguée, les nausées étaient insupportables et elle savait qu’elle ne pourrait pas réussir son examen dans ces conditions. C’est d’un air décidé qu’elle quitta l’école le jour-même et qu’elle laissa derrière elle de nombreux amis à qui elle ne confia pas son secret. Dès lors Bethany était devenue Clara.

“J’ai mal ! C’est horrible ! Je ne pourrais pas, sortez-le !” “Calmez-vous madame, vous pouvez le faire, j’en suis sûre. Respirez lentement comme vous l’avez appris. Doucement, et à mon signal vous pousserez !” Après plusieurs heures de travail, Clara finit par mettre au monde un beau petit garçon, elle l’appela Mathias Trent Howard. Elle respirait le plaisir, la satisfaction. Elle ne regrettait pas d’avoir quitté la formation des aurors, car elle avait trouvé beaucoup plus beau à travers la naissance de son petit garçon. Même si elle détestait le père biologique de ce dernier, elle savait que Mathias, lui, elle l’aimerait de tout son être. Le bébé était beau, il avait des petits cheveux bruns et lorsqu’elle put les voir, Clara retrouva en Matt les yeux de sa mère.

Clara versa le contenu de la dernière fiole du lot et partit à la conquête de son avenir.

“Pourquoi désirez-vous le poste de professeur de défense contre les forces du mal ?” “A vrai dire, je ne saurai pas trop vous dire pourquoi, mais la défense contre les forces du mal a toujours été ma matière préférée, comme vous pouvez le constater, j’ai excellé dans ces matières aux BUSE et aux ASPIC. Cela me permit même de suivre une formation d’auror, mais malheureusement, je ne pus pas arriver au bout, pour des problèmes personnels.” Clara parlait d’une voix assurée. “Pourquoi vous, plutôt qu’un autre ?” “Je dirai tout simplement parce que je connais ces lieux comme ma poche. Si vous avez lu mon dossier scolaire qui doit sûrement se trouver dans les archives, j’ai exploré les tréfonds de ce château, avant et après la guerre, et Poudlard c’est ma maison. J’ai également beaucoup de capacité à revendre, et je pourrais assurer les postes que vous désirez car je me sens à l’aise à peu près dans toutes les matières. Je suis prête vraiment à tout.” “J’ai appris que vous aviez un fils. Comment envisagez-vous de lier votre vie professionnelle et personnelle ?” “Ma grand-mère s’est installée tout récemment à Pré-au-lard et pourra s’occuper de lui en semaine, et je pourrai aller le voir quand bon me semble. Et si vous me le permettez, lorsque je ne serai pas de garde, j’aimerai loger à Pré-au-lard plutôt qu’au château pour m’assurer que mon fils puisse toujours me voir.” “Très bien. Je pense que nous en avons fini … Vous savez, quand je disais « pourquoi vous, plutôt d’un autre ? » je prenais mes rêves pour des réalités, parce que ce poste est toujours autant déserté, et vous êtes la seule postulante pour l’instant. Du coup, je pense que je vais vous prendre à l’essai.” Clara était heureuse comme jamais, elle avait obtenu le poste qu’elle désirait. Cela fait maintenant presque sept ans qu’elle est professeur à Poudlard, elle est très appréciée des élèves et aime partager son savoir. Elle continue à habiter Pré-au-lard et s’y rend très facilement via le passage sous le saule cogneur, mais elle est toujours là pour assurer ses cours quoi qu’il puisse arriver.

Clara sortit de ce souvenir, un sourire aux lèvres. Elle rangea les fioles dans la boîte et remit le tout à sa place. Soudain, Mathias débarqua dans la pièce. “Maman ! Dis, il parait que des moldus vont venir à Poudlard, c’est vrai ?” “Oui mon cœur ! Un homme a trouvé intelligent de donner aux moldus des pouvoirs. Je ne suis pas contre cette idée, mais malgré tout, je pense qu’il aurait pu trouver une meilleure façon de s’amuser ! En tout cas, j’espère vraiment que ces jeunes enfants vont réussir à s’adapter à ce nouvel univers qui n’est pas vraiment le leur …” Clara craignait que ces élèves aient du mal à se faire au monde des sorciers, elle avait aussi peur que les autres élèves se montrent agressifs ou désagréables envers ces nouveaux sorciers. Mais elle se promit qu’elle allait tout faire pour que les choses ne tournent pas mal et que ces élèves réussissent leur scolarité. L’affaire Fizwizbiz ne fait que commencer …