Tu te souviens, de ta vie d'avant ? Tu étais un tout jeune moldu, jeune mais déjà studieux et passionné. Ta vie était facile dans un sens, tu vivais chez tes parents, dans une petite maison en plein coeur de Londres. Tu n'avais ni frère ni soeur, et être fils unique ne te posait aucun soucis. Tu aimais la solitude, et le bien être que cela t'apportait. Te faire des amis n'était pas dans tes priorités, tu étais très amical certes, mais tu savais déjà reconnaître les profiteurs, ceux qui ne te voulaient du bien que le temps d'un service. Très doué pour les études, tu en as vu défiler, des intéressés, mais tu n'es pas dupe et même si un large sourire illuminait chaque jour ton visage, tu savais te jouer d'eux, prenant leur bêtise avec philosophie, en profitant pour t'amuser un peu. Mais pour en arriver là, il t'a fallut un peu de temps, le temps de grandir, de te rendre compte du monde dans lequel tu vivais, et de la nature des gens qui pouvaient bien t'entourer. Aujourd'hui mieux que jamais, tu sais à quel point les humains peuvent être des loups entre eux, mais optimiste que tu es, tu penses que tous n'ont pas un mauvais fond, et que chacun peut devenir meilleur. Menant ta petite vie d'écolier modèle, pourtant, ce n'était pas les insultes et autres mauvaises blagues à ton sujet qui manquaient, mais tu savais les ignorer, ou en rire, appelant leur méchanceté à ton encontre de la pure jalousie. Tu avais l'esprit ouvert, pour toi, il fallait de tout pour faire un monde, même des gens de cette espèce devenait indispensable pour que les uns et les autres puissent se sentir meilleurs, voire supérieurs.

Et puis tu m'as rencontrée, tu avais environ treize ans alors, et j'en avais autant. Il ne m'avait pas fallut longtemps avant de t'ouvrir mon coeur, en cette belle soirée d'été. J'étais seule dans mon jardin, ma baguette cachée dans la poche de ma petite veste. Et tu m'as vue, pleurant ma solitude assise en tailleur cachée derrière un arbre. Sans toi, j'aurai certainement suivi un tout autre chemin, et l'amie que tu connais depuis toutes ces années n'aurait jamais existé dans cette grande école emplie d'êtres en tout genre. Tu m'as rendue meilleure, et je t'en serai à jamais redevable, mais je ne suis pas là pour parler de moi. Attend un peu, que tout me revienne. Je m'en voudrai de déformer tes si belles paroles. C'est que tu avait l'air heureux, toi aussi, de trouver quelqu'un avec qui passer un peu de temps, et en même temps si triste de me trouver dans cet état. Il faut dire que pour une première rencontre, on fait mieux, mais d'un autre côté, quel meilleur moyen de sympathiser que de se réconforter l'un l'autre. J'ai vu comme tu étais heureux de sécher mes larmes et de me rendre mon sourire, ce visage rassuré, doux et libéré de toute contrariété, le visage d'un ami, d'un véritable ami. Voilà que ça me revient, « De si tristes larmes sur un si joli visage, quel gâchis... Besoin d'une épaule sur laquelle sécher ce gros chagrin ? » m'as-tu dis alors, si jeune et déjà charmeur sans vraiment chercher à l'être.

Nous en avons passé du temps ensemble, cet été là. Qu'il m'était agréable de passer ces vacances en ta compagnie. Je savais que cela m'était interdit de te parler de la magie, mais ce fut plus fort que moi. Chaque jour passant je sentais ce lien qui nous unissait plus fort encore, pour moi tu n'étais pas un simple ami moldu, et j'avais l'étrange impression que pour toi je n'étais pas qu'une simple ami humaine. Cela se voyait dans tes yeux, pétillants de vitalité, brillants de bonheur chaque fois que nos regards se croisaient. Mais aussi dans ta façon de me sourire, de te comporter avec moi. Très vite, j'ai eu la sensation que tu avais percé à jour mon secret, « Tu fais de la magie... » m'as-tu dis un jour. Il m'a fallut du temps, pour comprendre de quoi tu parlais, croyant d'abord que tu parlais de ma baguette et de ce que je pouvais faire avec. Alors je t'ai montré quelques tours, rien de compliqué, juste quelques bases, et devant ton air éberlué, j'ai compris que je m'étais trompée. Tu parlais de ton coeur, tu parlais de ce que tu ressentais en ma présence, de cet enchantement qui avait possession de ton esprit. Mais la magie t'as fasciné, au moins autant que ma personne. Ça non plus, ça ne m'était pas autorisé. Mais tu étais un moldu, qu'aurais-tu bien pu en faire à part les lire, les étudier ? Alors je t'ai passé quelques anciens livres de ma première année à l'école de magie, avant de repartir pour une nouvelle année. Comme un cadeau, pour que tu te souviennes de moi avant mon retour aux prochaines vacances.

Le jour de mon départ, de mon premier départ après notre rencontre, après tout ce temps passé ensemble, je t'ai brisé le coeur. Je l'ai vu dans tes yeux, ces larmes qui ne réussissaient à couler signifiaient pire que la tristesse d'une séparation. En te laissant seul, je faisais des miettes de ton coeur, et les mots que tu n'as jamais réussi à prononcer alors que je m'apprêtai à monter en voiture direction la gare témoignaient de la douleur qui se faisait une grande place en toi. J'ai eu honte, si tu savais, de t'abandonner ainsi.

Mais tu te souviens, de tout ces hiboux que je t'envoyai chaque semaine, toujours accompagnés d'un petit mot tout droit venu de mon coeur ? Tu te souviens, de nos retrouvailles lors de ce noël enneigé ? Tu te souviens, de ton coeur qui d'un coup d'un seul, n'était plus que d'un seul tenant lorsque nos regards se sont retrouvés ? Nous n'avons jamais été certains de la nature de nos sentiments, entre amis et amants, il n'y a qu'un pas, une toute petite limite que nous n'avons jamais dépassée, peut-être de peur de la réaction de l'autre. Et puis, nous étions si jeunes, qu'est-ce que l'amour après tout lorsque l'on a treize ans ?

Aujourd'hui, je pense pouvoir te le dire, mais avant, il faut que tu te souviennes de ta vie d'avant. Quand on faisait la course dans les rues, quand on faisait des bonhommes de neige en nous servant de celle qui était tombée sur les voitures. Il faut que tu te souviennes, de celui que tu étais avant, celui qui pouvait passer des heures sur la même chose pour être sûr qu'elle soit bien faite, celui qui voyait toujours le verre à moitié plein, celui qui aimait ne pas être comme monsieur tout le monde... Si je te dis tout ça, c'est parce-que je veux retrouver mon ami, celui qui fait que je suis moi aujourd'hui, celui qui fait que j'existe encore aux yeux de quelqu'un. Tu es devenu un sorcier, et je ne peux nier qu'il s'agit d'un changement considérable pour un moldu qui n'a jamais connu ce monde que nous nous efforçons de cacher à vos yeux, mais toi tu connaissais notre existence, nos facultés, avant de les acquérir à ton tour. Tu n'es pas comme eux, mais tu ne l'as jamais été. N'essaie pas de changer pour eux, mais reste tel que tu es pour moi. Être à part est une chance considérable, et si tu n'es pas quelqu'un de spécial à leurs yeux, sache que tu l'es pour moi.

« Tu sais, c'est pour ça que je t'aime. On a tous besoin d'un reflet pour se voir, pour savoir de quoi on a l'air. Mais personne ne peut avoir le reflet de son coeur. Sauf que je t'ai toi, toi qui me connais sur le bout des doigts, toi qui a déjà été repêcher mon âme enfouie au fin fond de mon coeur. Tu me connais mieux que je ne me connais moi-même, tout le monde devrait avoir quelqu'un comme toi à ses côtés. C'est toi qui m'a changé, toi qui m'a aidé et m'aide encore à être et rester celui que je suis. Je n'avais pas conscience de ce que la magie avait pu me faire, de comment elle avait pu me changer, et repenser à tout ces moments passés avec toi m'a fait ouvrir les yeux. En arrivant dans cette école, j'aurai pu, j'aurai dû même, passer plus de temps avec toi, et non pas t'oublier en me laissant entraîner dans ces bandes minables. J'espère que tu pourras me pardonner un jour, d'avoir perdu la tête, émerveillé par tant magie. Tu t'es souvenu de qui j'étais, quand je me suis perdu moi-même. »